La digitalisation dans le Trade Finance (extrait de l’ouvrage d’Hubert Martini)

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Paroles à un expert versus concepteur de solutions de digitalisation du Trade pour les banques et les entreprises.

Le Trade Finance a longtemps été insensible aux progrès technologiques, demeurant, par tradition et nécessité, enfermé dans des pratiques manuelles, complexes et consommatrices de ressources. Dans les années 2000, les banques, désireuses de faire baisser leurs coûts opérationnels, ont investi dans de nouveaux systèmes de back-office et proposé des portails de notification. Ceux-ci, bien que mettant fin à la pratique du fax dans une certaine mesure, se sont révélés insatisfaisants pour les entreprises. Les importateurs y sont très souvent réduits au simple rôle d’auxiliaires de saisie, et les grands groupes, devant communiquer avec une multitude de partenaires bancaires, doivent jongler avec autant de tokens, mots de passe, etc. Incapables d’obtenir des données consolidées, importateurs et exportateurs sont contraints de suivre leurs opérations de Trade à l’aide
de vastes tableurs, peu pratiques, fastidieux à maintenir et chronophage. Mais à l’heure où les exigences de conformité «compliance» se font croissantes, les marges des opérations de Trade diminuent au rythme où les liasses papier grossissent. Poussées par le contexte et ayant conscience des perspectives de bénéfices, les banques embrassent aujourd’hui les nouvelles technologies pour proposer de nouvelles solutions, plus sécurisantes et simples d’utilisation. Cet engouement manifeste se traduit par un foisonnement de projets de numérisation et de plateformes digitales qui promettent une modernisation du Trade longuement désirée.Ces plateformes et autres market-places portées par les grandes banques internationales utilisent la technologie de la blockchain pour mettre en relation les acteurs d’une opération. Dans un contexte où les documents seront totalement dématérialisés, cette technologie permettra, grâce aux smart contracts, des validations automatiques conditionnelles, une réduction des durées, des coûts et des risques associés. Au niveau de la supply chain, l’internet des objets (IoT) facilitera le suivi et la traçabilité des marchandises, pour un meilleur contrôle et un plus grand respect des nécessités de conformité.
A l’heure actuelle, ces technologies ne sont pas encore matures. Ces environnements promettant structuration et sécurité, notamment aux opérations non sécurisées dites d’open-account, ne jouissent en effet que d’une portée limitée: lesPME, souvent clients d’une même banque, dans le cadre d’opérations transfrontalières.

Crédits documentaires, lettres de crédit stand-by, cautions et garanties. La multiplication des projets pose également un problème majeur: celui de la gouvernance. Aujourd’hui aucun protocole (Ethereum, Corda, Korum, Ripple…) n’est encore parvenu à s’imposer comme standard, ce qui semble dessiner un avenir dans lequel de multiples plateformes logistiques et de financement cohabiteraient entre elles, soulevant le défi de l’interopérabilité. Le cadre juridique actuel reste lui aussi très insatisfaisant et constitue l’un des principaux freins à la pérennité et au développement de ces initiatives. Comme le souligne l’International Chamber of Commerce, la qualité légale des documents digitaux, et du connaissement maritime (B/L) en particulier, est en effet une nécessité à la digitalisation du Trade. Bien que des travaux soient déjà en cours, le processus promet d’être long et fastidieux avant d’obtenir l’approbation mondiale que les activités de commerce international requièrent.Entreprises et banques devront par ailleurs adapter leurs process internes à cette rupture technologique. De ce fait, loin de disparaître, les pratiques documentaires papiers traditionnelles perdureront en coexistence avec les techniques plus modernes digitalisées.

Le MT 798: une connexion directe aux banques

Malgré tout, des solutions adressées aux entreprises existent déjà afin de faciliter la gestion des opérations de Trade. Les entreprises peuvent dès à présent échanger avec leurs partenaires, notamment bancaires, des fichiers structurés de façon à collecter et centraliser les informations. Communiquer efficacement avec l’ensemble de ses banques facilite grandement les tâches du quotidien telles que les demandes d’ouverture, les réponses à un avis d’irrégularité, la prise en compte des relâches de stocks (technique très utilisée dans les opérations de négoce) etc. Cette évolution représente un pas non négligeable vers l’unification des processus de gestion des données (data management), essentiels au pilotage de la liquidité, à la prévision des cash flows et à la gestion des risques (risque de contrepartie, change, taux, cash-at-risk, etc.).
A ce jour, le mouvement d’automatisation du traitement des opérations de TradeFinance est mené par la centrale de messagerie financière internationale SWIFT, reconnue par les banques du monde entier. Celles-ci communiquent en effet entre elles via des messages structurés selon ce standard et échangés en suivant un protocole précis. Les messages SWIFT relatifs au Trade Finance sont de type 7XX.
Le fameux message MT 700, par exemple, contient les termes et conditions d’un crédit documentaire. Sur le modèle du format allemand DTA, SWIFT a pris l’initiative d’étendre son protocole de messagerie pour permettre aux entreprises de dialoguer directement avec leurs banques. Cette communication se fait par le biais de requêtes spécifiques FileAct ou via des messages FIN structurés, qui sont transportés dans des enveloppes dites MT 798. Le transport des messages s’effectue nativement via le canal Swiftnet. Néanmoins, une entreprise et sa banque peuvent tout à fait convenir d’un autre canal (Ebics, Host to Host, SFTP, etc.). Les échanges entre la banque et l’entreprise prennent la forme d’un lot de messages MT 798, dont chaque type représente un événement précis, comme une demande d’ouverture, un avis d’irrégularités, etc. Un lot est composé d’un premier message d’index, suivi d’un message de détail et d’un éventuel message d’extension. Il existe en tout 48 types de messages.

Exemple MT798 770-700-701 : Demande d’ouverture d’un créditdocumentaire
Exemple MT798 <770><700><701> : Demande d’ouverture d’un crédit documentaire

L’adoption de ces nouveaux messages a connu un démarrage timide en raison de l’incapacité des banques à traiter ce type de message, leurs process back-office n’y étant pas adaptés. Des entreprises avaient alors dû stopper ou reporter leur projet d’informatisation de leur Trade Finance.On constate aujourd’hui une inversion de la tendance. Le sujet « MT 798 » gagne en notoriété au sein des banques, y compris des banques régionales, qui ont pour la plupart démarrer les développements ou tout au moins lancer des études de faisabilité. Ce n’est pas moins de 46 banques qui sont à ce jour opérationnelles sur le MT 798, selon SWIFT, dont une majorité de banques européennes.

Echantillon de banques opérationnelles sur le MT 798
Echantillon de banques opérationnelles sur le MT 798
Croissance des communications via MT 798
Croissance des communications via MT 798

De cette façon, importateurs, exportateurs et négociants peuvent communiquer avec l’ensemble de leurs banques via un canal unique. Pour ce faire, l’entreprise devra au choix adapter son outil informatique à ce nouveau protocole, ou utiliser un logiciel qui traite l’ensemble des messages SWIFT MT 798. L’éditeur Finelia, par exemple, propose ainsi une solution multi-banques de traitement et de suivi dédiée au Trade, permettant de gérer
tous les instruments de paiement (crédits documentaires, remises documentaires, garanties, open account et supply chain finance) en intégrant l’ensemble des messages structurés MT 798. Les opérateurs peuvent ainsi avoir une vision consolidée de l’ensemble de leurs activités de Trade, un véritable besoin alors que l’analyse des
données devient capitale.

Echantillon de banques opérationnelles sur le MT 798

Crédits documentaires Lettres de credit Standby, Cautions et Garanties : conforme aux RUGD 758
Auteur : Hubert Martini

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